On interviewe Pulp Eviction !

Cinquième et dernière interview avec une joueuse jeune maman. C’est avec Pulp Eviction que nous clôturons cette série...

 

Question : Peux-tu te présenter pour nos lecteurs ?

Réponse : Pulp, j’ai 30 ans, et j’ai fait mon freshmeat day en novembre 2012, ça fait donc 7 ans que j’ai enfilé mes patins (ouch ça ne nous rajeunit pas). J’étais joueuse (bloqueuse) depuis plusieurs années avant ma grossesse, j’ai aussi fait partie de la Team Belgium et participé à la coupe du monde à Manchester. J’ai fait une petite pause bébé à partir de juillet 2018. Ma petite fille est née en avril, et j’ai réenfilé mes patins en août cette année.

 

Q : Comment as-tu vécu ta grossesse au sein du sport ?

R : Ma grossesse est arrivée au bon moment. J’étais contente de ma saison à Namur, on avait fait un émouvant dernier match contre Liège début juin (plusieurs joueuses quittaient l’équipe), et j’avais d’ailleurs commencé ce match en pleurant (true story). Finalement, c’était mon dernier match à moi aussi, mais ça je ne le savais pas encore, j’avais prévu de recommencer la saison en août. J’ai bien fait de déjà verser quelques larmes du coup. J’ai joué pour la dernière fois au sur5al d’Anvers, et puis la fin de saison est arrivée, je suis tombée enceinte, et je n’ai pas repris avec les autres en août. C’était assez louche, puisque généralement je ne loupais pas d’entrainements, et j’allais souvent coacher les autres équipes aussi. L’excuse des travaux dans la maison n’a pas tenu le coup longtemps. J’ai fait une saison assez « off », sans m’investir dans les entraînements. J’ai gagné pas mal de temps pour me consacrer à d’autres choses (maison, ne plus devoir bosser pour l’école tard le soir, refaire de la musique, …). J’ai participé aux événements de la ligue avec plaisir pour encourager les autres équipes, en remplaçant les patins par les baskets et avec un peu plus de bide à chaque fois.

Je n’ai pas patiné de toute ma grossesse, j’ai fait beaucoup de natation, et un peu de yoga pour femmes enceintes, histoire de remettre mon dos en place de temps en temps. On a beau se dépenser pas mal dans l’eau, ça ne me défoulait pas autant qu’un entraînement en équipe, et c’est vachement moins d’adrénaline que de bloquer quelqu’un.

 

Q : Comment s’est passée ta reprise du roller derby ?

R : J’ai commencé à essayer de me remuscler en juin, en faisant beaucoup d’abdos hypopressifs et de la natation.

Pour le derby, l’avantage c’est que j’ai recommencé en août, en même temps que tout le monde. Le début de saison, c’était des entraînements communs, on fait pas mal de skills, d’exercices abordables pour tout le monde. C’était sympa comme retour, histoire d’y aller en douceur, et je me suis juste concentrée sur les skills les 2 premiers entraînements, sans pression, et sans faire de contacts. Pour le reste, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas, et quand on est arrivés aux entraînements en équipe début septembre, je me sentais à l’aise avec mon patinage. En terme de skills je n’ai pas l’impression d’avoir beaucoup perdu, par contre je n’ose pas sauter aussi haut ou loin qu’avant. Pour la conscience de jeu, ça revient petit à petit, et le fait d’avoir fait un scrimmage (vs Anvers) et un tournoi (à Hambourg) aussi tôt dans la saison m’a obligée à me donner à fond pour suivre. Les autres joueuses de l’équipe envoient du lourd et sont ultra motivées, du coup c’est très boostant ! Cette saison s’annonce super et je suis contente d’avoir réussi à m’intégrer ce début de saison, sans me sentir larguée tout le temps. J’étais assez stressée en voyant le niveau général. Pour la confiance en moi, ça reviendra petit à petit, j’essaie de ne pas me stresser avant un match, et de me focaliser sur les trucs qui ont fonctionné, et pas les moments où je fais de la m****.

 

Q : Etre maman, ça a changé quelque chose dans ta vie de joueuse ?

R : Comme je le disais, je flippe pour les sauts ! Je suppose qu’il faudra un peu de temps !

Pour le reste hors derby, c’est clair que ça demande beaucoup d’organisation. Le papa fait du sport aussi, le même soir que moi, du coup il a fallu s’organiser pour qu’on puisse tous les deux continuer. Ensuite, je ne me voyais pas là il y a quelques mois, mais j’ai poursuivi l’aventure de l’allaitement, et combiner sport et allaitement, c’est beaucoup de logistique. Surtout quand on part en tournoi 3 jours à l’étranger, rien de plus glamour que de tirer son lait assise par terre dans les douches du vestiaire. Beaucoup de fun pour moi, mais aussi mes coéquipières. Et j’ai aussi un peu plus peur des impacts au torse, logique.

Et puis, il y a les jours où partir à l'entraînement alors qu’une petite tête mignonne nous regarde, c’est dur, on culpabilise de s’en aller. Mais une fois à l'entraînement, j’apprécie totalement ce défoulement total, et le fait de ne penser à rien d’autre. Un moment pour moi que je savoure encore plus qu’avant ma grossesse.

Le derby m’a en tout cas aidé à me réapproprier mon corps. Remettre des fringues de sport, prendre une douche en équipe, pas les étapes les plus sympas à vivre après un accouchement, mais c’est juste un cap à passer, et puis on se sent vachement mieux. Et les moments où on est fière de ce qu’on a fait à l'entraînement, ça fait beaucoup de bien au moral !

 

Q : Quel conseil donnerais-tu à une maman qui souhaite reprendre le roller derby ?

R : C’est clair que c’est stressant de reprendre, tu sais que tout le monde a patiné pendant un an, vu des nouvelles stratégies, pendant que toi tu enflais ;-) mais il faut y aller en douceur, tout en se donnant à fond, et tout en écoutant son corps bien sûr, et ça revient petit à petit. Être au maximum de ses capacités, à chaque fois, en n’en faisant pas trop, mais en se poussant, et on récupère son niveau. Se donner des petits objectifs, comme quand on est freshmeat, et comme ça on se voit progresser. Et surtout ne pas se comparer aux autres joueuses (comme toujours au derby en fait).

Aussi : ne pas négliger la kiné ! Faire des abdominaux hypopressifs, pour se remuscler la ceinture abdominale. Indispensable pour le derby ! (d’ailleurs, tout le monde devrait faire ces abdos, pas juste les mamans)

Et surtout : être fière de soi ! Remettre ses patins, c’est déjà top, venir au premier entraînement c’est le plus dur. Être patient avec soi-même, et profiter un maximum !


Crédit photo : David Van Elslande